« Pour que l'on me retire une tumeur au mois de juillet, je suis allée moi-même au bloc, ça dédramatise l'opération et on est moins stressé », témoigne une patiente. Depuis le lancement de ce dispositif novateur, en décembre 2010, plus 20 000 patients opérés au Centre Léon Bérard (CLB) se sont rendus à pied, et non alités comme en général, de leur chambre d’hospitalisation au bloc opératoire. Une petite révolution dans l’univers de l’hôpital français. En effet, si dans les pays nord-américains, cette pratique est aujourd’hui courante depuis une quinzaine d’années, actuellement en France, peu d’établissements ont mis en place un tel dispositif et à cette échelle. « Nous réalisons près de 5 000 interventions chirurgicales par an, explique le Pr Michel Rivoire, responsable du Département de Chirurgie du CLB. Et plus de 90% des patients vont arriver debout au bloc, car ce dispositif concerne aussi les personnes ayant de lourdes interventions chirurgicales ».
Cette nouvelle organisation, proposée en 2010 par le Dr Hervé Rosay, anesthésiste réanimateur, satisfait à la fois les personnes malades et les professionnels du bloc opératoire. « Si des problèmes d’ergonomie et de stockage des lits ont constitué les prémices de réflexion, très vite, nous avons orienté notre travail vers l’amélioration de la prise en charge du patient, qui reste au coeur des priorités de chacun d’entre nous au Centre Léon Bérard, explique le Dr Rosay. Plutôt que de voir arriver les personnes passives, transies de froid et nues sous une blouse ouverte qui est aujourd’hui décriée, nous leur proposons désormais d’arriver debout, habillées et avec leurs prothèses capillaires, dentaires et/ou auditives ». Les personnes malades interrogées disent être moins stressées et retrouver aussi leur dignité à leur arrivée au bloc opératoire. Le dispositif est une réussite et a fait des émules. « Ces 5 dernières années, nous avons reçu une vingtaine d’équipes chirurgicales d’autres hôpitaux qui souhaitent mettre en place ce dispositif dans leur bloc. Nous avons également reçu un prix de l’innovation, en 2013, de la fédération UNICANCER », expliquent Marie Vivas, cadre de santé du Bloc opératoire, et Christine Laurent, cadre de santé du secteur chirurgie.

Les patients sont informés du dispositif par le médecin anesthésiste réanimateur et le chirurgien grâce à un support d’information élaboré spécifiquement. La veille de l’intervention, ils reçoivent la même prémédication qu’auparavant, en revanche la prescription est allégée le matin de l’intervention. Les patients ayant choisi la nouvelle option arrivent donc au bloc opératoire à pied, accompagnés par les brancardiers, et vêtus d’une tenue à usage unique (pyjama vert). Ils sont accueillis dans un salon d’attente, sonorisé et dont la lumière est tamisée. Un infirmier ou un médecin du bloc vient les accueillir pour les accompagner dans la salle d’intervention.

« Ils s’installent eux-mêmes sur la table avec une aide pour ceux qui sont moins autonomes », précise le Dr Rosay. L’anesthésie et l’intervention chirurgicale se déroulent normalement puis la personne malade est conduite en salle de réveil, puis elle rejoint sa chambre en lit. Deux enquêtes de satisfaction ont été menées auprès des patients, la première fois trois mois après la mise en place du dispositif et la seconde un an plus tard. Les résultats sont positifs : 98 % des 192 patients interrogés apprécient cette organisation et 97,3% estiment que leur dignité est ainsi mieux respectée.
Le dispositif concerne actuellement plus de 90% des patients pris en charge au bloc opératoire du CLB.