Les chimiothérapies et les immunothérapies sont des traitements efficaces contre les cancers. Malheureusement, certains cancers sont soit peu sensibles aux chimiothérapies et immunothérapies, soit deviennent résistants aux traitements de références, conduisant ainsi à des récidives.
À mesure que les cancers progressent ils subissent des modifications au niveau cellulaire, phénomène appelé transition épithélio-mésenchymateuse (TEM ou EMT en anglais). La TEM est associée au développement, à la progression et à la métastase des tumeurs, ainsi qu'à la résistance à la chimiothérapie et à l'immunothérapie. Malheureusement, il n’existait pas jusqu’ici de molécules thérapeutiques bloquant ce phénomène de TEM.
Dans deux études publiées cet été dans le prestigieux journal Nature, l’équipe CRCL « apoptose, cancer et développement » dirigée par Patrick Mehlen (directeur du CRCL et directeur de la recherche du CLB), en collaboration avec une équipe de l’Université Libre et avec le département de la recherche clinique du Centre Léon Bérard est parvenue à montrer que la protéine appelée netrin-1, connue essentiellement jusqu’ici pour avoir un rôle au cours du développement embryonnaire, est sécrétée par les cellules cancéreuses afin de permettre cette fameuse transition épithélio-mésenchymateuse.
Dans des modèles précliniques de cancers de l’endomètre, les résultats vont même jusqu’à montrer que le blocage de l’activité de la netrin-1 déclenche la mort des cellules cancéreuses et inhibe la TEM. Sur la base de ces résultats, les auteurs ont examiné le potentiel du NP137, un anticorps monoclonal issue des travaux académiques de l’équipe du Dr. Mehlen et qui bloque netrin-1. NP137 a été testé dans le cadre d'un essai clinique humain de phase 1, piloté par le Centre Léon Bérard impliquant des patientes atteintes d’un cancer de l’endomètre avancé.
Le traitement s'est avéré sûr et des réponses antitumorales ont été observées pour une partie des patientes, avec une stabilisation de la maladie, voire pour l’une d’entre elles une réduction des métastases.
Par ailleurs, des essais sur modèles précliniques ont montré la performance des traitements de chimiothérapie conventionnels s’est améliorée lorsque combinée au NP137. Dans la seconde étude (publiée simultanément dans Nature), co-réalisée par une équipe de l’Université Libre de Bruxelles et par l’équipe du Dr. Mehlen, les résultats précliniques montrent que l’utilisation de NP137 s’avère aussi efficace pour bloquer l’activité de netrin-1 et augmenter l’efficacité des traitements conventionnels dans d’autres cancers (cancers de la peau et cancer du poumon).
Les résultats produits dans l’ensemble de ces deux études suggèrent que les thérapies visant à inhiber netrin-1 pourraient être utilisées pour surmonter la résistance aux traitements.
C’est d’ailleurs dans cet esprit qu’un ambitieux essai clinique de phase II, actuellement en cours et piloté par le Centre Léon Bérard, teste chez les femmes atteintes de cancers gynécologiques (investigateur principal : Pr. Isabelle Ray-Coquard) l’association de ce candidat médicament (NP137) avec une chimiothérapie et/ou une immunothérapie. Les résultats de cet essai devraient être connus en milieu d’année 2024.
Des résultats prometteurs qui laissent entrevoir de nouveaux espoirs pour de nombreux patients.